Vous devez mourir
L’article de cette semaine met à l’honneur le trentième anniversaire de l’éveil de Sadhguru. Sadhguru y parle de son expérience personnelle et nous incite à aller au-delà de nos limites pour atteindre l’ultime. « C’est juste un rappel pour ne pas oublier que ce que vous pensez être “vous-même” est une projection imaginaire de votre mental. Si vous la tuez, alors tout est juste ici, la vie est un flot d’extase. »

Il y a 30 ans, ce soir-là, alors que je m’efforçais de sortir d’un flot d’extase et de réalisation, je me suis dit : « C’est ça, c’est tellement simple. Je vais mettre le feu au monde entier. » Depuis lors, très lentement mais sûrement, le monde a essayé de me forcer à réduire la taille de mes limites géographiques. Je ne me plains pas du monde. Je pense que la vie, intérieurement ça ne fait aucun doute, s’est déroulée de la meilleure façon possible pour moi. Même extérieurement, elle s’est déroulée de la meilleure façon possible, donc je ne peux pas me plaindre. Mais quand même, ça m’intrigue, ça me dérange, je n’ai toujours pas retenu la leçon en 30 ans. Même si j’ai commencé à parler à des personnes ayant des objectifs réduits, la passion brûle toujours en moi : « Pourquoi ça ne peut pas arriver à tout le monde ? » Car, d’un point de vue logique, je n’arrive pas à trouver une seule raison expliquant pourquoi tout le monde ne pourrait pas y arriver. Dans mon intelligence, je ne trouve pas une seule raison expliquant que ce n’est pas possible.
Il y a beaucoup de noms glorieux pour ça, qui sont hors de la compréhension des gens. Les gens appellent ça l’« illumination » : ça veut dire, bien sûr, que ça nous dépasse. Les gens appellent ça la « réalisation de Dieu » : c’est là-haut dans les cieux, on ne peut pas y toucher. Les gens appellent ça simplement la « réalisation de soi » : une description plus humble. Ou bien, c’est juste un « éveil ». J’appelle ça un rappel. Vous pouvez recevoir un rappel de diverses façons. Demain matin, vous devez vous réveiller à une certaine heure. Vous pouvez vous le rappeler vous-même ; si vous n’y arrivez pas, vous pouvez avoir une sonnerie d’alarme qui émet un signal sonore. Sinon, quelqu’un battra du tambour, ou quelqu’un vous réveillera d’un coup de pied. Le choix vous appartient, mais vous pouvez vous éveiller ou nous pouvons vous le rappeler. C’est juste un rappel, ce n’est pas un accomplissement. Il ne s’agit pas d’aller quelque part.
Voici ce qui, un jour, arriva... Une femme est au bord d'une rivière. C’est si beau : l’étendue d’eau et l’autre rive. Puis elle remarque qu’il y a une autre femme de l’autre côté. Alors elle appelle et demande : « Comment puis-je passer de l’autre côté ? » Cette femme regarde la rivière d’un côté et de l’autre, à la recherche d’une solution, puis elle regarde la femme et lui répond : « Vous êtes de l’autre côté. »
C’est aussi simple que ça, c’est aussi évident que ça, mais on nous a donné un mental doté d’une certaine compétence. Je sais que de nos jours, les gens vous disent que vous devriez faire abstraction de votre mental. Beaucoup de gens le font déjà, et c’est le plus gros problème sur la planète. Le plus gros problème sur la planète, c’est simplement qu’un certain nombre de personnes refusent d’utiliser leur mental. Ce mental vous est donné pour que vous puissiez vous projeter, penser à l’instant suivant, à demain, à dans 1 000 ans, à un million d’années en arrière ou en avant, selon votre profession, si vous êtes historien ou astrologue. Vous jouez ce jeu, en oscillant sans cesse entre ces deux professions. Certains se lamentent sur hier, d’autres attendent avec impatience quelque chose de glorieux ou d’effrayant pour demain. Vous fonctionnez soit en tant qu’historien, soit en tant qu’astrologue. C’est ce qui se passe constamment. Il n’y a rien de mal à ça : c’est la capacité du mental et c’est fantastique. Le seul problème, c’est que les projections deviennent si réelles qu’elles effaceront la réalité. Et les projections proviennent d’un certain ensemble de compulsions physiologiques, chimiques, hormonales, karmiques et sociales : tant de compulsions différentes. C’est parce que le corps et le mental fonctionnent à partir de ces compulsions que le simple fait de se rappeler la nature de son existence semble être si complexe.
Dans une école du dimanche, un enseignant veut inciter les enfants à aspirer à ce qu’il y a de plus haut. Dans l’école du dimanche, dans l’école de l’église, le plus haut niveau, c’est le paradis bien sûr, pas Dieu. Alors l’enseignant demande aux enfants : « Si je donne mes richesses à l’Église et que je sers l’Église, est-ce que j’irai au paradis ? » Les enfants répondent à l’unisson : « Non ! » Puis il demande : « Si je sers les pauvres, lave les pieds du lépreux et essuie les larmes du visage d’un enfant, est-ce que j’irai au paradis ? » Les enfants répondent : « Non ! » Puis il demande : « Si j’aime ma femme, si j’aime mes enfants, si je prends soin de ma famille, fais mon devoir envers ma nation, est-ce que j’irai au paradis ? » Ils disent : « Non ! » Puis il demande : « Alors, que dois-je faire pour aller au paradis ? » Le petit Tommy, depuis les bancs du fond, dit : « Vous devez mourir. »
C’est tout : vous devez mourir. C’est le seul problème. C’est juste un rappel que ce que vous pensez être « vous-même » est une projection imaginaire de votre mental. Si vous la tuez, alors tout est juste ici, la vie est un flot d’extase. Vous n’avez pas besoin de tuer le monde : il vous suffit de tuer « celui-ci ». Ce n’est pas à vous de tuer le corps parce que ce n’est pas vous qui l’avez créé. Vous avez tous les droits de tuer tout ce que vous avez créé, vous n’avez aucun droit de tuer ce que le Créateur a créé. Personne n’a le droit de tuer ce qu’il ne peut pas créer. Mais la personne que vous appelez « moi-même » est entièrement votre création. Si vous tuez juste cet unique élément, tout l’univers vous appartiendra.
C’est un troc : moi ou le cosmos ? Celui qui conclut l’accord ne demande pas d’argent, juste vous. C’est juste ça, le troc ; c’est juste ça, toute cette histoire d’illumination. « Réalisation de Dieu », « éveil », « rappel » : quel que soit le nom que vous lui donnez, c’est juste ça. Tuez juste ce que vous avez créé : la création du Créateur va exploser en vous.
Amour et Grâce,
*Extrait du Satsang du 23 septembre 2012, le 30ème anniversaire de l'éveil de Sadhguru.